Pharmaciens : comment accompagner vos patients dans l’arrêt du tabac

Pharmaciens : comment accompagner vos patients dans l’arrêt du tabac

Développez de nouveaux services au sein de votre officine en accompagnant vos patients dans leur démarche de sevrage tabagique.

L’arrêt du tabac est un enjeu majeur de santé publique. En officine, le pharmacien est en première ligne pour accompagner le patient dans cette démarche, en combinant écoute, suivi et expertise des traitements disponibles.

Dans cet article on vous explique comment:

1. Initier le dialogue avec le patient
2. Evaluer la motivation et la dépendance 
3. Adapter le choix des substituts nicotiniques
4. Suivi et accompagnement dans la durée
5. Outils utiles pour l'officine

Quelques chiffres clés pour orienter le conseil

• En 2023, 23,1 % des adultes de 18 à 75 ans déclaraient fumer quotidiennement — contre 25,3 % en 2021 —, soit le niveau le plus bas jamais enregistré depuis l’existence de cet indicateur (d’après l’OFDT / Santé publique France). 
• En 2023 encore, 31,1 % des 18-75 ans déclaraient fumer (quotidiennement ou occasionnellement), démontrant que le tabagisme reste un phénomène étendu (selon Santé publique France / OFDT).
• D’après l’OFDT, les volumes de tabac vendus dans le réseau des buralistes ont diminué de 7,2 % en 2023 par rapport à 2022.
• Toujours selon les données publiques (ministère de la Santé / programmes de lutte contre le tabac), le tabac reste responsable d’environ 75 000 décès par an en France.

Ces données confirment l’importance du rôle du pharmacien, souvent premier interlocuteur des fumeurs souhaitant arrêter.

1. Initier le dialogue avec le patient

Quand proposer l’accompagnement ?

De nombreuses occasions se présentent à l’officine :
• lors de la délivrance de traitements pour des pathologies liées au tabac (maladies cardiovasculaires, BPCO…) ;
• quand un patient achète des dispositifs respiratoires ou des produits de sevrage ;
• pendant des campagnes comme Mois Sans Tabac ou lors de la diffusion de kits d’aide à l’arrêt ;
• au comptoir, dès qu’un patient exprime une envie d’arrêter ou de “réduire un peu”.

Le guide Mois Sans Tabac recommande de valoriser chaque tentative, même partielle : toute réduction est une étape vers l’arrêt complet. Le pharmacien peut renforcer son positionnement en affichant les supports de la campagne, en distribuant le kit “40 jours pour arrêter de fumer” ou en proposant une mini-consultation tabac.

Les questions d’amorçage :

• « Avez-vous déjà envisagé d’arrêter de fumer ? »
• « Qu’est-ce qui vous motiverait aujourd’hui ? »
• « Qu’est-ce qui rend la démarche difficile pour vous ? »

Ces questions aident à situer le patient dans son parcours de changement et à ajuster le conseil au bon moment (préparation, action, maintien).

Pharmacienne en dialogue avec une patiente pour le sevrage tabac

2. Évaluer la motivation et la dépendance

La motivation :

Selon Santé publique France, la préparation psychologique est une clé majeure du succès. Encourager le patient à identifier ses motivations personnelles (santé, famille, sport, économie…) et à fixer une date d’arrêt claire améliore les chances de réussite.

Le pharmacien peut proposer au patient de noter ses raisons d’arrêter ou d’utiliser le carnet de suivi Mois Sans Tabac pour consigner ses progrès. Une approche positive, centrée sur les bénéfices ressentis (meilleure respiration, goût retrouvé, économies) est plus efficace que le discours sur les risques.

La dépendance à la nicotine :

Le test de Fagerström aide à évaluer la dépendance. Selon le score, le pharmacien peut orienter le patient vers un dosage adapté ou une combinaison de substituts. Un fumeur très dépendant bénéficiera souvent d’un patch à forte dose associé à une forme orale pour gérer les envies soudaines.

3. Adapter le choix des substituts nicotiniques

Les traitements nicotiniques de substitution (TNS) demeurent la première ligne du sevrage tabagique. Ils permettent d’apporter la nicotine sans les substances toxiques de la fumée et contribuent à limiter les symptômes de manque. L’association d’un patch (diffusion lente) à un produit oral (gommes, pastilles, spray, inhalateur) est souvent la plus efficace. Une durée minimale de 3 à 6 mois est recommandée, avec diminution progressive selon la tolérance et la réussite.

Conseils pratiques à transmettre :

• Adapter le dosage selon la dépendance et les besoins.
• Surveiller les signes de sous-dosage (envies fortes, nervosité) ou de surdosage (nausées, palpitations).
• Ne pas interrompre le traitement trop tôt : le sevrage complet nécessite du temps.
• En cas d’échec, réévaluer la stratégie sans jugement : changer de forme, ajuster la dose ou renforcer le suivi.

4. Suivi et accompagnement dans la durée

Structurer les points de suivi :

Proposer un accompagnement régulier : à J+7, J+15, puis à 1 mois et au-delà selon les besoins. À chaque contact, réévaluer :

• la motivation ;
• les envies persistantes ;
• la tolérance au traitement ;
• les réussites à valoriser.

Le kit Santé publique France recommande de “célébrer chaque jour sans tabac” : féliciter le patient, même pour de petits pas, entretient sa motivation.

Anticiper les symptômes de sevrage :

• Toux expectorante : signe positif du nettoyage bronchique ; • Constipation ou fatigue : encourager hydratation, fibres et activité physique ; • Irritabilité, stress, fringales : recommander des pauses respiration, relaxation, tisanes calmantes ou chewing-gums sans sucre ; • Crainte de prise de poids : expliquer que la reprise de poids moyenne reste limitée (2 à 4 kg) et peut être contrôlée avec une alimentation équilibrée.

Le pharmacien peut s’appuyer sur les conseils du livret Mois Sans Tabac pour proposer des activités de substitution : marcher, boire un verre d’eau, appeler un proche, respirer profondément — tout ce qui aide à détourner l’envie passagère.

Quand orienter vers un spécialiste ?

• dépendance très forte, échecs répétés ;
• comorbidités psychiatriques, anxiété sévère ;
• grossesse ou allaitement ;
• patients en traitement pour une autre addiction.

Le pharmacien peut alors orienter vers un tabacologue ou une consultation d’aide au sevrage.

Suivi et accompagnement du patient

5. Outils utiles pour l’officine

• La brochure “Prise en charge de l’arrêt du tabac – conseiller et accompagner” (Santé publique France) offre des fiches pratiques pour l’entretien officinal.
• Le dispositif Tabac Info Service (39 89) propose un accompagnement téléphonique gratuit et une application mobile de coaching.
• Le kit “Mois Sans Tabac” contient un livret de 40 jours, des autocollants, un calendrier de suivi et des conseils motivationnels à remettre aux patients.
• Les affiches et présentoirs officinaux renforcent la visibilité du message et favorisent les échanges spontanés au comptoir.

En conclusion

L’accompagnement à l’arrêt du tabac fait partie intégrante du rôle de conseil du pharmacien. En combinant écoute, motivation, suivi structuré et utilisation des outils disponibles (TNS, coaching, applications), le pharmacien devient un acteur clé du succès du sevrage tabagique. Chaque interaction au comptoir est une opportunité d’aider un patient à franchir le pas vers une vie sans tabac.

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